Prix Aliénor 1998
Née à Québec, Hélène Dorion a publié une trentaine de livres (roman,
poésie, essais, album jeunesse) pour lesquels elle a reçu de nombreux
prix littéraires. Citons le prix Mallarmé, le prix Charles-Vildrac de la
Société des Gens de Lettres, le prix du Gouverneur général du Canada,
le prix Wallonie-Bruxelles, le prix Aliénor, le prix des écrivains
francophones d’Amérique, le prix de la revue Études françaises de
l’Université de Montréal, le prix Alain-Grandbois, le prix Anne-Hébert
et le prix Léopold-Senghor pour l’ensemble de son œuvre.
En 2006, Hélène Dorion a été reçue à l’Académie des lettres du
Québec. En 2007, elle a été décorée de l’Ordre national du Québec à
titre de Chevalier, et en 2010, elle a été nommée Officier de l’Ordre du
Canada. Bibliothèque et Archives Canada a fait l’acquisition de son
fonds d’archives en 2006.
Traduite et publiée dans une quinzaine de pays, son œuvre a fait
l’objet de colloques, thèses et mémoires. Des numéros de revues ont été
consacrés à son travail, et un ouvrage collectif regroupant les
collaborations de plusieurs auteurs et critiques a été publié sous le
titre Nous voyagerons au cœur de l’être ; autour d’Hélène Dorion.
En 2012, la Bibliothèque Nationale de France lui a consacré une soirée
hommage dans le cadre de la série « Grands poètes d’aujourd’hui ».
Hélène Dorion est aussi l’auteure d’une quinzaine de livres
d’artistes, et elle collabore fréquemment à des ouvrages collectifs et à
des anthologies. Elle a fait partie de la rédaction de plusieurs
revues, dont Estuaire [Québec], le Courrier du Centre International d’Études Poétiques [Belgique], Cronica [Roumanie] et Présages
[France], et a collaboré, à titre de critique, à diverses publications
culturelles et littéraires. Elle a en outre préparé des numéros de
revues étrangères consacrés à la poésie québécoise ainsi que des
anthologies de poètes québécois et une édition des poèmes de Saint-Denys
Garneau. Hélène Dorion a été directrice littéraire des Éditions du
Noroît de 1991 à 2000, et a réalisé une série d’enregistrements audio de
poésie et musique. En 1999 et 2000, elle a été écrivain en résidence à
l’Université du Québec, puis à l’Université de Montréal. Plusieurs de
ses textes sont mis en musique par des compositeurs et
auteurs-compositeurs. Des artistes visuels ont aussi travaillé à partir
de ses œuvres. Elle a fait partie du comité de rédaction de la revue Les écrits,
du comité de direction de la « Rencontre québécoise Internationale des
Écrivains » et elle est membre du jury permanent du prix international
de poésie de langue française Louise-Labé.
Hélène Dorion a été chroniqueure pour la revue Relations. Elle collabore régulièrement avec l’Opéra de Montréal et, depuis 2015, elle présente le concert littéraire AU CREUX DU TEMPS avec Les Violons du Roy. Une exposition itinérante de photographies tirées de son plus récent ouvrage, Le temps du paysage, est présentée depuis mars 2016 en différents lieux au Québec.
Cinq poèmes de
PIERRES INVISIBLES
de HÉLÈNE DORION
Page 7
Tu soulèves la pierre
où se tenait le poème.
Une première étoile se met à
briller.
Bientôt le ciel
entier se déchire :
poussière de mots
amas de pierres minuscules
qui gravissent la montagne.
Tu vois l’arbre
et la feuille et le bourgeon
-toutes choses que jamais encore
tu n’avais vues.
Page 12
Poème, éclat de vérités
au dernier soir
on nous interrogera, toi et moi
sur l’aube bleue, les
marées ;
on voudra savoir ce qui nous
amarre
aux mêmes bords fragiles
des jours, on demandera à toucher
le fil qui noue les heures
et les assemble en une vie.
Page 22
Ce qui nous unit tient au vent, à
l’argile où l’on plonge soudain sa vie pour qu’elle s’y éveille comme un corps
en un autre corps. Chaque chose ainsi empreinte, chaque chose habitée.
N’écrit-on que les yeux fermés,
avec une ombre accrochée au bras - une onde alors flotterait, inimaginable
vertige de l’âme allant plus loin qu’elle-même, et sait-on si elle reviendra jamais,
cette âme éblouie de terre ?
Page 43
C’est ce visage, l’éblouissement,
la main qui saisit le silence entier, secoue, broie, force les racines,
pêle-mêle comme un arbre fouillé par le froid.
Parfois l’on aime et cet amour
est sans geste, simplement, on aime ce visage bouleversant de présence, cette
sensation d’être au bord du plus pur en nous, d’un centre où les mots agrandissent
ce qu’ils touchent.
Page 53
Tu gravis pas à pas l’édifice du
temps
jusqu’au dernier soir, tu iras,
parfois lourd
parfois maladroit, en cette dure
densité
des pierres qu’une à une tu
soulèves
-petites épaves de silence, ô
poème
que rassembles-tu en moi, que
rassembles-tu
qui jamais ne le fut ?
Voici que tu reviens du bout des
pierres ténébreuses
et demandes par où commencer
par où le vent et par où le
sable ?
Nous ne sommes pas autrement
habités.
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